Sabrina, Old sorceress

Les pouvoirs naissent facilement quand votre famille les conditionnent longuement. Quand on né sorcière, on le sait. Ce sont des choses qui ne se discutent pas, dont on apprécie la présence. Je l'ai toujours eu dans mes veines et quand mes capacités ont commencé à se développer, quand je grandissais à Montreal, je n'ai pas eu besoin d'être étonnée, effrayée, j'avais été préparé. C'était un jour paisible de mai, pendant une réunion de famille, ce fut la télékinésie qui se déclara d'abord auprès de ma mère en saisissant une fleur tombée. Un instant comme un autre pour moi, pas de quoi s'étonner ou s'étaler à ce sujet!

J'ai quand même la sensation que toute sorcière ne le vit pas de la même façon, chez moi, les sorts étaient issus d'un apprentissage long, c'est pour cela qu'à chaque mot bafouillé, prononcé, je n'ignorais pas ce qu'il allait advenir, il en était de même pour toute plante et j'ai su concentrer mes efforts sur certains pouvoir dès ma jeunesse afin que mon évolution soit plus rapide. Rien ne m'a surprit, j'ai juste aimé cette révélation et je m'efforce d'en offrir autant à celles que je considère comme mes propres filles.

Plus de 10ans de pratique désormais, je ne suis pas vraiment une "jeune" sorcière et ceci est préférable vu ma situation. En fait je suis simplement sensible comme toute autre à la puissance d'un sort, la fatigue mentale est encore présente et subsiste, j'ai beau espérer la voir disparaitre, cela n'arrivera pas.
Alors oui, je suis ce qu'on peut considérer comme une "vieille" sorcière, les sorts ne consistent plus qu'à une bonne préparation et une bonne connaissance.

Craindre, aimer, apprécier, quelle importance? Chaque être de chaque race est différent, chacun possède sa particularité alors pourquoi s'ennuyer à réagir différemment? Un royaume se mérite, diriger une espèce aussi, œuvrer pour le bien de celle-ci également. Les lycans, les vampires sont des êtres à part entière, et pour le nerf de la guerre, il faut bien travailler avec eux.
Oh peut-être un peu plus les lycans, mais surement juste grâce à ce Drakan qui fait d'elle une lionne lors des combats à engager, pour le reste, elle ne tente qu'à mettre en place un certain équilibre, l'ordre le plus complet pour chacun. La neutralité serait certainement le mot d'ordre pour cette sorcière, les guerres entre race lui semblent tout à fait surfaite et stupide. Pourquoi se battre sans raison quand la véritable guerre se trame au final entre des êtres cruels et froids qui ne pensent qu'à une suprématie?
J'ai peut-être un faible pour l'instinct protecteur et la force de l'instinct des lycans, j'aime leur façon de prendre soin les uns des autres mais j'aime tout autant la ferveur et l'intelligence des vampires comme j'adore l'innocence de l'humain. Je ne me séparerai d'aucune race puisque nous sommes complémentaires.

Seriez vous friands des jours de sabbats? Ils sont pour nous les instants où nos pouvoirs révèlent leur puissance et où nos dieux peuvent nous communiquer nos croyances ancestrales. Je ne suis parfaitement moi que ces jours précis, quand la lune rouge vient frôler l'autel dressé à notre déesse et quand les forces pénètrent les unes après les autres nos corps offerts. Il n'y a plus chez nous qu'un réceptacle immense, notre corps n'est plus qu'un moment de pur énergie et nous en serions presque divine et plus accrochée que jamais à cette Terre. Ce sont les instants dont je suis friande, les instants où nos ancêtres viennent communier avec nous, ces instants où le vaste schéma terrestre prend un sens clair et où tout se forme avec précision.
Mon premier sabbat eu lieu à Toronto, je m'en souviens parfaitement, j'étais encore jeune, à peine quelques années et mes pouvoirs ne s'étaient encore jamais déclarer. Mais c'est au moment où j'ai rejoins le cercle de ces femmes nues aux corps luisants sans gêne au reflet de la lune, encerclant cet autel fleurit de lauriers et de roses que j'ai compris que peu importait nos différences, nos noms, nos âges, l'énergie pure de la sorcellerie qui était déjà une partie de nous était une unité qui nous liait les unes aux autres. Impossible de refuser, impossible de s'échapper, ce cercle était là pour rappeler à chacune la force et le devoir que nous possédions. Je n'ai jamais été autant touché, près de ma mère si concentrée et de ma grand-mère tant offerte à l'instant, saisissant chaque parole de chacune, les chants proféraient en une seule voix si particulière, j'ai sentit pour la première fois ce qu'était une sorcière: la gardienne, celle qui devait conserver l'équilibre entre les mondes. C'est ce jour de sabbat que la vérité a éclaté dans mon âme. J'enseigne depuis cette vérité à chaque lune, à chaque femme égarée de notre tradition millénaire. Qu'importe si ma vie ne m'appartient pas vraiment, je préfère la voir appartenir au monde lui-même et au bien être de chacun.

C'est une diatribe que je ne cesse de me répéter avant ce moment, avec cette nuit programmée par les astres. Ce soir sera notre premier sabbat depuis l'ouverture du portail, depuis l'énergie terrible déployée par Axelle et moi pour refermer et protéger ce monde. Ce soir sera notre premier sabbat où l'invitation ne concernera pas seulement les sorcière mais aussi les vampires et les loups-garous. Suis-je devenue folle? Est-ce une façon de perturber l'équilibre même du monde? J'ai pourtant la sensation au plus profond de moi, de mon âme, que c'est là l'unique solution pour réunir chaque race et oeuvrer d'un front commun. J'ai offert chaque consigne à chaque chef de clan, la purification est importante, le rituel est complexe, il me faudra procéder à ce dernier pour eux avant de les mener jusqu'au lieu de notre réunion. Suis-je donc folle? Je ne dois pas douter... Et pourtant, ce portail ouvert, qu'adviendra-t-il de nous? J'ai beau me répéter qu'il ne faut plus que je me pose de questions, que je ne dois pas interférer avec l'énergie même du sabbat, je n'y parviens pas. Fort heureusement j'ai encore assez de temps. Le temps de penser, le temps de souffler, le temps de me vider l'esprit. Mère, Grand mère, vous ne quittez jamais mon existence et vous m'avez guidé, permettez moi de me reposer une fois de plus sur vous pour ce moment difficile.

La pièce est purifiée, le sol de bois se dévoile froid sous mes pieds désormais nus. Tout est prêt, l'athamé n'attend plus que le reste des artifices. Un cercle de sel parfait, l'encens préparé lors d'une lune saignante, tout est là, tout est pret et sous ma robe rouge de cérémonie qui relève à merveille ma chevelure rousse, digne héritage des femmes de ma famille, j'entame le début du rituel, le rituel de la prêtresse. A mesure que les mots, chant délicat en langue celtique désormais morte, sortent de mes lèvres au rose froid et délicat, les images apparaissent les unes après les autres, un père qui ne désire pas un instant voir une sorcière, une vie perdue, les flashs vont et viennent jusqu'à disparaitre peu à peu pour ne laisser qu'une brume profonde dans mon esprit sans que les mots me manquent jamais. Le rituel avance, je le sais, je sens les énergies des autres prêtresses, des autres meneuses se mêler à moi. Je ne dois plus avoir en tête qu'elles et notre héritage. Quand la puissance monte peu à peu, je sais qu'il est tant d'abandonner cette robe et de ne plus laisser que mon corps nu s'offrir aux fumées de l'encens se limitant dans ce cercle de sel étrange. Un corps offert, l'athamé, les mots qui se font plus rudes, c'est dans le chaudron bien posé au centre que je dépose un peu de mon sang récolté par ma lame. L'odeur de celui-ci doit se mêler au sang de dragon et à la mandragore qu'il m'a fallut avaler pendant des jours pour être prête, me sentent-ils, mes nouveaux invités, dans leurs terres?

Le sang se mêle, il n'y a aucun doute, la fumée dense qui s'échappe de cette coupe signifie que je suis prête à purifier chacun des membres de notre sabbat. Je me sens d'une puissance folle, de l'énergie pure et en me levant je sens à peine mon corps, l'impression étrange de flotter me vient à l'esprit, je reprend du bout des doigts ma robe pour la passer et saisit cette coupe pour prononcer une première formule de téléportation. Il est impossible de perdre des minutes supplémentaires. Ces messieurs seront là bas, ils connaissent chaque instruction, je ne dois pourtant pas les regarder. Je sens leur odeur, le sel d'un cercle parfait sous mes pieds et il m'est difficile d'empêcher mes paupières de se lever. Pourtant, cérémonie et devoir oblige, je sais résister, mes ordres sont succins mais je les sais présents.

Ne pas leur laisser une minute, chanter et les purifier, ont-ils put se passer du sang? Ont-ils compris l'importance de ce moment? Il n'y aura qu'eux, Axelle et moi pour ce cercle de sabbat, sont-ils conscients de l'offrande qu'ils obtiendront? Je sens la mandragore perler doucement sur mon front, serais-je donc quelque peu inquiète? A force de prononcer quelques mots celtes, je n'ai pas fait attention au reste et quand ma robe glisse pour dévoiler mon corps nu, j'oublie moi même les conséquences d'un tel acte pour des relations hommes-femmes mais quelle importance? Ma vie se résume à ma sorcellerie et en laissant le calice passer entre leurs mains, j'ai l'impression d'en prendre un peu plus conscience.

Je sens maintenant la présence d'Axelle à mes côtés et les rayons de lune se poser sur nos corps nus. La communion est présente et deux sorcières font faces à ces autres races. Se rend-elle compte de la confiance que je lui accorde? Ma fille, malgré notre peu de différence d'âge, je donnerai tout pour elle quoique ce ne soit pas une grande référence, je donnerai tout pour les miens. C'est ce que j'appelle mon instinct de louve.

Ce qui advient ensuite? Je l'ignore, je n'ai plus sentit là que les énergies, plus qu'une communion parfaite mais terriblement puissante, aucun mot n'aurait pu se situer là, le sabbat se solda par un réveil difficile, nue sur l'herbe alentour, seule, retenant Axelle dans mes bras comme pour la protéger sans pour autant pouvoir me séparer d'une énergie différente se faufilant dans mes veines. En ignorant ce que l'avenir venait d'offrir à chacun d'entre nous, je ne doute pas une seconde que j'ai eu là diverses réponses. Sans savoir où le loup et le vampire avaient entamé leur chemin, jamais un mot ne fut prononcer à ce sujet mais cela ne put qu'impliquer l'importance d'un sabbat. Je suis toujours tout aussi consciente de l'importance de protéger nos races. Nous sommes des gardiennes, et je ne laisserai ce pouvoir nous échapper.